François Jay : La création d’Ebano Finance a répondu à un triple constat : d’une part, la forte croissance du nombre et de la qualité des entreprises africaines, dirigées par des entrepreneurs de mieux en mieux formés et de plus en plus tournés vers l’économie moderne, d’autre part, le besoin croissant de financement pour répondre à une demande domestique ou régionale qui se développe avec la population, l’urbanisation et la mondialisation des produits – en clair, le boom de l’économie africaine –, et enfin l’appétit logiquement accru des investisseurs financiers, qu’ils soient étrangers ou africains d’ailleurs, pour les marchés africains. Il est loin le temps où les investisseurs étrangers, en dehors de la bière et des cigarettes, ne venaient que pour servir les besoins des riches Occidentaux en matières premières, en fruits exotiques ou en tourisme ! Nonobstant, la rencontre entre ces entreprises et ces investisseurs se fait encore trop mal. D’où l’idée de cette plate-forme Internet de rencontre créée sur l’idée originale qui veut que l’investissement soit effectué sur la base d’un intérêt équilibré.
FJ : Notre approche est originale car elle s’oppose à un modèle classique dans lequel l’entreprise vient voir les investisseurs quand elle a besoin d’eux, en s’adressant à eux soit en direct, soit par le biais d’un intermédiaire intéressé : c’est donc en position de demandeur que l’entreprise a un premier contact avec l’investisseur, et cela ne la prépare pas au mieux à la négociation à venir, et encore moins à la coexistence future. Nous, nous permettons une rencontre d’abord anonyme, puis distante et digitale, et nous assistons les entreprises dans leur préparation : il est rare, hélas !, que le meilleur entrepreneur soit aussi celui qui formalise le mieux son business plan…
FJ : C’est là que repose la force de l’offre d’Ebano Finance : nous disposons, dans plus de 15 pays maintenant, de partenaires locaux qui apportent un regard et un soutien de proximité aux entreprises. Ainsi, nous venons juste de signer le 19 février dernier un partenariat en Guinée avec Elite Com et nous espérons pouvoir avancer vers des premières transactions à l’automne. L’environnement en Guinée est beaucoup plus favorable à l’entrepreneuriat que ce qui en est souvent dit : il y a dans le pays un grand nombre d’entrepreneurs très courageux et innovants, et pas seulement de brillants commerçants.
FJ : De fait, c’est bien une dynamique de boule de neige que nous avons enclenchée dans certains pays : les entreprises viennent vers Ebano, dont le réseau les renforce et les prépare au mieux à contacter des investisseurs – ou des prêteurs, d’ailleurs, car la vision stratégique est rassurante pour des banquiers –, ce que ne pourront bientôt plus ignorer les fonds d’investissement à la recherche d’opportunités en Afrique.
FJ : En effet, dans l’ensemble des zones CFA, nous sentons un véritable enthousiasme. Cela dit, soyons clairs et transparents : toutes les entreprises ne rencontreront pas un partenaire en capital par notre intermédiaire. Mais nous voyons déjà des entrepreneurs qui sont plus lucides sur leur avenir, qui connaissent mieux la véritable situation de leur entreprise, qui ont fait des choix d’activités et ont identifié des partenaires commerciaux ou industriels : bref, qui sont mieux préparés à discuter avec des banquiers pas si hostiles qu’on le dit souvent.
FJ :Le principe, et c’est une originalité de notre modèle, est la gratuité pour les entreprises africaines. Les fonds d’investissement, eux, paient un abonnement annuel et une faible commission (0,5 %) sur la transaction. J’ajoute que nous lançons dès fin février un abonnement d’essai à 1 000 d pour 6 mois.
FJ : Cette commission est modeste, donc nous ne concurrençons pas les banques d’affaires sur leur métier qui consiste, certes, à trouver des investisseurs, mais surtout à accompagner les deux parties jusqu’à la transaction : nous, nous n’intervenons que sur la première partie.
FJ : Avec mon associé Adramé Ndione, nous allons changer d’échelle en 2018 grâce à notre levée de fonds de fin 2017, et nous devrions finir l’année avec une présence formelle dans plus de 25 pays du continent, avec plus de 1 500 entreprises qui nous auront fait confiance en s’inscrivant sur notre plate-forme (1). Cette dernière sera rénovée, notamment grâce au soutien de BPI France, et encore plus dynamique, et elle empruntera aux techniques les plus récentes d’intelligence artificielle et de data mining que nous aurons de nouveau fait développer en Afrique. Beaucoup de rencontres fructueuses en perspective, comme vous le voyez !